Rechercher

Deux lésions radio-opaques sur l’orthopantomogramme_2_

QUEL EST VOTRE DIAGNOSTIC ?                           QUEL EST VOTRE TRAITEMENT ?
RÉPONSE

  Le premier scanner a été réexaminé avec attention et les 2 lésions, évidentes, étaient situées dans la loge amygdalienne gauche (fig. 3 a, b et c). Dans la loge amygdalienne droite, des microcalcifications étaient également visibles.

 Le diagnostic est celui d’une lithiase amygdalienne (« tonsillolith » des Anglo-Saxons).
Sous anesthésie générale, après une incision à la face postérieure du pilier amygdalien antérieur, 2 lithiases
amygdaliennes ont été enlevées sans difficulté (fig. 4). La même technique a été appliquée du côté controlatéral pour extraire les microcalcifications.

  L’orthopantomogramme postopératoire a confirmé l’exérèse des 2 lésions. Le patient a été revu en consultation à 1 mois et à 3 mois. Depuis l’intervention, les douleurs ont disparu et il n’y a eu aucun épisode fébrile.
DISCUSSION

Si les microcalcifications des grosses amygdales sont fréquentes, les lithiases amygdaliennes sont très rares. Dans une revue récente, Ram n’a retrouvé que 26 cas publiés dans la littérature anglo-saxonne entre 1920 et 2003 . Ces lithiases amygdaliennes sont appelées tonsilloliths dans la littérature anglo-saxonne mais ne semblent pas avoir d’équivalent en français.

 Ces lithiases sont composées de sels de calcium et se formeraient à partir du matériel caséeux des cryptes amygdaliennes et des filaments des germes saprophytes. Elles sont plus fréquentes chez l’adulte jeune que
chez l’enfant et surviennent 2 fois plus fréquemment chez l’homme que chez la femme . Les patients présentant des lithiases amygdaliennes peuvent être asymptomatiques et le diagnostic est fait par hasard sur des panoramiques dentaires réalisés pour une autre pathologie. Elles peuvent aussi être symptomatiques et provoquer des douleurs chroniques de la gorge, une toux irritative, une dysphagie, des otalgies, une halitose, une sensation de corps étranger dans la gorge, des épisodes récurrents d’amygdalite, des ulcérations de l’amygdale . Ces symptômes et les images inhabituelles sur le panoramique dentaire qui se projettent sur le ramus peuvent être source d’erreurs diagnostiques.

  Les diagnostics différentiels sont les pathologies de l’amygdale (infections aiguës et chroniques, tumeurs), le
syndrome de Eagle, les lithiases parotidiennes, les corps étrangers et les calcifications vasculaires. Le scanner rétablit le diagnostic à condition d’examiner les loges amygdaliennes. Le traitement est chirurgical et l’exérèse de la lésion est facile. S’il existe un aspect d’amygdalite chronique il faut réaliser une amygdalectomie.


Figure 4 : Vue opératoire des deux lithiases amygdaliennes.

















                                                               Figure 3 : a, b et c) Scanner en coupes axiales, coronales et sagittales montrant les deux opacités de la loge amygdalienne gauche.








































Deux lésions radio-opaques sur l’orthopantomogramme

OBSERVATION

  Un homme de 27 ans a été vu dans le service de chirurgie maxillo-faciale pour le bilan de 2 lésions radio-opaques se projetant dans la région de la branche montante gauche de la mandibule dans un contexte de douleur et d’oedème de la joue gauche (fig. 1). Le praticien qui avait adressé ce patient avait retenu le diagnostic de lithiase de la glande parotide gauche. Le patient ne prenait pas de traitement et n’avait aucun antécédent. Trois mois auparavant, il avait présenté une douleur localisée dans l’oropharynx, la joue, la région sous-mandibulaire gauche associée à une otalgie homolatérale. Depuis cet épisode, il présentait
de la fièvre (38,5 􀁱C) environ 2 fois par semaine.
  À l’examen, on ne retrouvait qu’une douleur provoquée à la palpation de la joue et de la région sous-mandibulaire. Il n’y avait pas d’adénopathie cervicale. L’examen endobuccal était normal. L’indication de parotidectomie superficielle était posée à la fin de la consultation.
Figure 1 : Les deux opacités sur le panoramique dentaire

  Une IRM a été réalisée sans retrouver de lithiase parotidienne ni de dilatation canalaire. Le radiologue a alors réalisé un scanner avec injection de la région parotidienne. Mais la parotide et son environnement étaient normaux.

  L’orthopantomogramme a été refait ; il mettait en évidence les deux mêmes lésions radio-opaques. Des radiographies standards selon différentes incidences ont révélé que les opacités étaient situées en dehors de la région parotidienne
(fig. 2 a et b). Les clichés dynamiques sous scopie montraient que les 2 lésions étaient mobiles lors de la déglutition.





























Figure 2 : a et b) Différentes incidences radiographiques
montrant que les opacités siègent en
dehors de la région parotidienne.






































Des ulcérations « douteuses » de la cavité buccale_2_

Quel est votre diagnostic ?

  Il s’agit d’une syphilis secondaire.
Le diagnostic a été retenu devant l’association de lésions polymorphes de la cavité buccale, avec une atteinte cutanée et des signes généraux  la positivité des sérologies et l’orientation homosexuelle recueillie lors de l’interrogatoire.
En effet, les penetrations étaient protégées mais pas les rapports orogenitaux, mode de contamination le plus probable chez ce patient et le plus probable dans le cadre de l’épidemie actuelle de syphilis chez les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes. Véritable fléau depuis la fin du xve siècle jusqu’a la seconde guerre mondiale et l’apparition de la pénicilline , le diagnostic de syphilis n’est plus assez évoque de nos jours. Il s’agit pourtant d’une affection en recrudescence depuis une dizaine d’années, notamment dans le milieu homosexuel, en particulier du fait de l’absence de protection lors des rapports orogenitaux.

  Par ailleurs, il existe une forte corrélation entre la maladie syphilitique et l’infection par le virus de l’immunodeficience humaine (VIH) . Non seulement la co-infection paraît plus agressive qu’une mono-infection, le VIH accroissant le nombre et la fréquence des ulcères génitaux, prolongeant les phases primaire et secondaire, et précipitant le stade de neurosyphilis, mais en plus, il semblerait que la syphilis orale favorise l’infection au VIH.


   La syphilis est une maladie sexuellement transmissible causée par un spirochète  le Treponema pallidum. La contamination est pratiquement toujours sexuelle et directe . La cavité buccale est le site extragenital le plus communément atteint : 12 a 14 % pour la syphilis primaire . L’évolution de la maladie se fait en trois phases : primaire, secondaire, phase de latence, tertiaire . La syphilis primaire survient après une période d’incubation
d’environ 20 jours suivant la contamination. La principale symptomatologie en est le chancre, réalisant une
érosion, voire une ulcération classiquement indolore, avec une induration marginale et dont la cicatrisation est
spontanée en six a huit semaines. Il existe une ou plusieurs adénopathies satellites pouvant persister plus longtemps.

   La syphilis secondaire débute 60 jours après la contamination et peut durer jusqu’a trois ou quatre ans en l’absence de traitement. C’est la phase de généralisation de la maladie, communément appelée « la grande simulatrice » compte tenu de manifestations buccales, systémiques et cutanées  Les manifestations buccales de la syphilis secondaire sont superficielles, disséminées et le plus souvent douloureuses. Elles ont une tendance spontanée a la cicatrisation et récidivent fréquemment.

 La multitude de formes cliniques (syphilides erythemateuses, opalines, érosives  papuleuses, hypertrophiques) peut faire évoquer a tort un grand nombre de diagnostics diffe-
rentiels.
 Les manifestations générales sont marquées le plus souvent par un syndrome pseudo-grippal  L’angine syphilitique est fréquente. Une micropolyadenopathie généralisée est quasi constante.

  Les manifestations cutanées distinguent deux périodes :
la première floraison avec la roséole (macules erythemateuses rose pale au niveau du tronc et la racine des membres, respectant la face, non prurigineuses) ; la seconde floraison avec les syphilides papuleuses
(papules infiltrées cuivrées atteignant principalement la face et les régions palmoplantaires, non prurigineuses).
Apres une phase de latence asymptomatique, la syphilis tertiaire débute trois a 15 ans après la contamination. Les manifestations sont essentiellement neurologiques, cardiaques, osseuses et cutaneomuqueuses (gommes réalisant des nodules hypodermiques inflammatoires indolores le plus souvent au niveau de la face).

   Le diagnostic de syphilis est essentiellement biologique . Les tests réalises en pratique (VDRL et TPHA), longtemps négatifs en cas de syphilis primaire, sont positifs lors de la syphilis secondaire, avec des titres eleves en anticorps (fig. 4) . Le patient présente dans le cas clinique était positif au VDRL a 1/16 et au TPHA a 1/5120.
  Enfin, il n’existe pas de diagnostic anatomopathologique, les aspects histologiques étant variables. Le seul intérêt de la biopsie étant l’elimination d’un diagnostic différentiel . Le traitement recommande est le « traitement minute » : benzathine-penicilline (ExtencillineW), 2,4 millions d’UI en intramusculaire . C’est le traitement dont a bénéficié notre patient dans cette observation, favorisant la cicatrisation, même si celle-ci est en général spontanée en l’absence de traitement.
Figure 4. Schema simplifie d’aide a l’interpretation des serologies de lasyphilis.182

 En cas d’allergie, le traitement par cyclines (VibramycineW per os, 200 mg/j) ou macrolides (ErythromicineW per os, 2 g/j) pendant 15 jours est recommande.
 La réaction de Jarish-Herxheimer associant fièvre  frissons, malaise général et éruption cutanée dans les six heures suivant l’injection de pénicilline est traitée par corticothérapie.

Par ailleurs, une enquête epidemiologique est nécessaire a la recherche et au traitement des partenaires sexuels potentiellement contamines.
C’est la diminution significative du VDRL (baisse du titre du VDRL de quatre fois en six mois) qui permet de suivre l’éfficacite du traitement.
Cependant, les sérologies de syphilis peuvent rester positives si le traitement est instaure tardivement.

Conflits d’intérets
Il n’y a aucun conflit d’intéret.









Des ulcérations « douteuses » de la cavité buccale


Observation
    Monsieur G.B., age de 42 ans, a été adresse a la consultation car il présentait depuis un mois une gêne  pharyngée de type angine.
Les seuls antécédents notables étaient d’ordre dermatologique et assez récents : pityriasis rose de Gilbert  associe a un prurigo, deux épisodes de prurit generalise considérés comme une gale et traites par ivermectine (StromectolW) a neuf reprises en l’espace de deux mois.

  L’examen clinique endobuccal retrouvait des lésions multiples et heterogenes avec notamment des lésions ulcérées des deux loges amygdaliennes, prédominant a gauche (fig. 1), trois ulcérations infracentimetriques sensibles a la palpation situées a la jonction palais dur – palais mou de part et d’autre de la ligne médiane (fig. 2). Enfin, le patient présentait une discrète inflammation du frein de lèvre
supérieure.
La palpation cervicale mettait en évidence une adénopathie spinale gauche indolore.
Figure 1. Aspect inflammatoire et tuméfie des deux loges amygdaliennes(flèches).















Figure 2. Lésions ulcérées du palais (flèches).














   L’examen général retrouvait de manière concomitante des lésions cutanées erythematomaculeuses au niveau des bras (fig. 3).
  A noter que monsieur G.B., divorce et sans enfants, était en cours de sevrage alcoolique. Les examens biologiques réalisés jusqu’alors étaient normaux : hémogramme, bilan hépatique, serologies VHC, VHB, VIH 1 et 2.
Figure 3. Lésions cutanées siégeant au niveau des bras.




Carcinomes des lèvres_5_

Figure 7   Carcinome verruqueux commissural gauche
















Figure 8    Carcinome basocellulaire de la lèvre supérieure

















Traitement
   Les carcinomes épidermoïdes labiaux relèvent de la chirurgie d’exérèse avec plastie de reconstruction (techniques de Dieffenbach, Bernard, Abbé, Estlander, Gillies, McGregor, Ginestet, Meyer et Shapiro, Johansen, Fries, etc.) .
  L’aspect fonctionnel est un élément primordial de toute reconstruction labiale.
Les carcinomes de plus de 2 cm de diamètre associent un évidement ganglionnaire cervical prophylactique, éventuellement combiné avec la radiothérapie selon le nombre de ganglions atteints et la présence de ruptures capsulaires. Pour certains, un évidement ganglionnaire au moins sus-hyoïdien est indiqué d’emblée pour toute tumeur supérieure à 1 cm. La technique d’exérèse par étapes de Mohs nécessite une équipe entraînée et demeure peu pratiquée en France.
 La radiothérapie directe sur la lesion, et particulièrement, la curiethérapie est actuellement exceptionnelle.

Le taux de survie à 5 ans est > 80 % pour tous les auteurs et peut atteindre 96,7.

Autres carcinomes labiaux
   Les tumeurs malignes des glandes salivaires accessoires labiales sont exceptionnelles, comparées à celles des glandes salivaires principales ou accessoires dans d’autres localisations (palais). Les cylindromes  (carcinomes adénoïdes kystiques) et les tumeurs muco-épidermoïdes sont surtout localisés à la lèvre
inférieure. L’aspect est celui d’un nodule qui devient ulcéré. Leur évolution est plus ou moins rapide et les métastases sont relativement précoces.
Le carcinome basocellulaire est le plus fréquent des cancers cutanés. Il est exceptionnel dans sa localisation sur le versant cutané labial, plutôt supérieur. Le développement de la tumeur est lent et sa malignité est purement locale. L’aspect typique est celui d’une ulcération cutanée entourée d’un bourrelet perlé. Le type le plus fréquent est l’épithélioma plan cicatriciel (figure 8). Les formes ulcéreuses ou infiltrantes sont possibles.




Carcinomes des lèvres_4_


 Formes cliniques particulières
 Cancers du versant muqueux de la lèvre inférieure
  Cette localisation est fréquente dans les populations qui ont l’habitude de garder du tabac dans le vestibule buccal, surtout en Inde, au sud est asiatique mais aussi au Soudan [4]; le tabac est maintenu dans le vestibule, soit avec de la chaux éteinte (« catachu ») soit avec une noix ou feuille de betel (« pan ») ou
noix d’Arèque. Au Cambodge, le bétel chiqué est une habitude féminine, et ce type de cancer est le plus prépondérant chez la femme. Enfin chez les patients qui placent du tabac à priser dans le vestibule buccal inférieur, des leucoplasies typiques peu symptomatiques se développent, uniformes mais mal circonscrites (figure 6). C’est en particulier le cas aux Etats-Unis surtout chez les femmes (snuff dipper’s keratosis). L’âge
avancé et une consommation anormalement élevée d’alcool sont des facteurs favorisant l’apparition du cancer.
   Le carcinome épidermoïde adénoïde kystique ou cylindrome, rare dans cette localisation, n’est qu’une variante du carcinome épidermoïde se développant à partir des glandes salivaires accessoires de la face interne des lèvres.

Cancers de la commissure labiale
Ces tumeurs sont rares (4 % des cancers des lèvres). La lésion est une ulcération fissuraire à base indurée dont l’extension se produit avec prédilection vers la muqueuse jugale et non la peau ; elle siège dans certains cas uniquement sur la muqueuse rétrocommissurale, affleurant la commissure proprement dite. Elle succède généralement à une leucoplasie le plus souvent d’origine tabagique (en Inde particulièrement, du fait de fumer
le « bidi », cigarette à bon marché). La présence chronique de Candida albicans est fréquente, faisant discuter la possibilité que la lésion soit, à l’origine, celle d’une candidose chronique.
Figure 6     Leucoplasie de la face interne de la lèvre inférieure (tabacchiqué)














   Des formes verruqueuses de carcinome peuvent être observées aux commissures labiales. Il s’agit le plus souvent de transformation maligne d’un carcinome verruqueux d’Ackerman (ou papillomateuse orale floride) ou de l’évolution d’une PVL (Proliferative verrucous leucoplakia) [7]. Dans le premier cas, il s’agit souvent d’une lésion papillomateuse jugale plus ou moins verruqueuse qui s’étend en nappe et atteint la commissure (figure 7). Différents stades histologiques (stade I, aspect de papillome avec gros bourgeons épithéliaux renflés à la base), stade II avec apparition de petits bourgeons secondaires sur les faces latérales des papilles et épaississement des couches cellulaires basales) rendent compte de l’évolution inexorable de ces lésions vers un carcinome infiltrant (stade III). Les types 16 et 11 du HPV ont été détectés dans ces lésions orales. Le traitement est chirurgical suivi d’une surveillance rapprochée pour détecter les récidives, fréquentes. L’irradiation de ces lésions n’est pas recommandée en raison du risque d’évolution vers des carcinomes anaplasiques. Des atteintes ganglionnaires ont été occasionnellement rapportées et les métastases sont rares.

    Dans la PVL, la lésion de départ peut être une leucoplasie homogène évoluant progressivement pour devenir inhomogène avec des dysplasies, puis éventuellement nodulaire et/ou verruqueuse avec transformation maligne.

   Explorations
  La découverte d’un carcinome épidermoïde labial impose la recherche, chez les fumeurs, d’une deuxième localisation au niveau des VADS par un examen complet de la cavité buccale, de l’oropharynx, du larynx et de l’hypopharynx : une panendoscopie peut être proposée. Une radiographie pulmonaire et une échographie hépatique complètent ces explorations. Pour les tumeurs de grande taille (> 2 cm), ou en présence d’adénopathie, on demande une tomodensitométrie de la région cervicale pour mieux juger de l’extension locorégionale.




Carcinomes des lèvres_3_


 Pour examen histologique de la totalité de la pièce. La réparation se fait par glissement de la muqueuse de la face interne de la lèvre inférieure. Il est à noter que la chéilite actinique peut être associée à d’autres kératoses actiniques des téguments exposés, particulièrement la face. Chéilite actinique et chéilite tabagique peuvent s’associer et augmenter le risque de carcinome. Enfin, le carcinome épidermoïde labial peut se développer sur d’autres lésions précancéreuses comme :
     l’erythroplasie de Queyrat (rarement labiale pure) ;
     les lesions licheniennes chroniques ;
      les lesions de lupus chronique ;
     une cheilite glandulaire chronique, les cicatrices de brulures ;
     les radiodermites ;
    les ulcerations chroniques.

Types de description
   Le carcinome épidermoïde se présente le plus souvent sous forme d’une érosion chronique, croûteuse, ou comme une ulcération à bords irréguliers, infiltrante, d’évolution lente (figure 5). L’aspect de tumeur végétante ou bourgeonnante est plus rare. Un signe important est l’induration de la lésion qui est perceptible en périphérie, plus ou moins étendue en profondeur, qui déborde toujours largement les limites visibles
de la lésion. En évoluant, la tumeur prend une forme ulcérovégétante. L’extension du côté buccal peut atteindre le sillon gingivolabial, la gencive et l’os mandibulaire ou en dehors la commissure labiale et la joue avec dans ce dernier cas un pronostic beaucoup plus sévère. Des localisations labiales multiples sont possibles. Des carcinomes épidermoïdes peuvent être présents dans d’autres localisations, VADS ou
cutanées.

    Les métastases ganglionnaires sont habituellement tardives ; la fréquence des métastases lymphatiques primaires varie de 2 à 10 % lors de la première consultation  ; elles sont sousmentales, sous-mandibulaires et, dans les cas avancés, préauriculaires et jugulocarotidiennes. Les carcinomes très bien différenciés métastasent dans moins de 10 % des cas alors que les carcinomes peu différenciés métastasent près d’1 fois sur 2. Les carcinomes labiaux supérieurs croissent plus vite et métastasent plus rapidement que les carcinomes labiaux inférieurs, probablement parce que le drainage lymphatique labial supérieur est plus riche. Métastases mandibulaires et métastases multiples entraînant des paralysies de nerfs crâniens ont aussi été rapportées.

Histopathologie
Le carcinome épidermoïde se développe sur une muqueuse d’apparence saine ou atteinte d’une précancérose originelle que l’on peut encore parfois reconnaître. C’est une prolifération épithéliale maligne développée aux dépens des kératinocytes. Selon le degré d’infiltration et de franchissement de
la membrane basale, on parle de carcinome in situ (ou intraépithélial ou dysplasie sévère), de carcinome micro-invasif ou de carcinome invasif.
  Dans le carcinome in situ, il existe une transformation segmentaire de l’épithélium portant sur toute sa hauteur sans modifications de la membrane basale. L’épithélium est irrégulièrement stratifié, avec des noyaux de forme et de taille inégales, hyperchromatiques et des mitoses visibles jusqu’en surface. Dans le carcinome micro-invasif l’aspect est proche, mais on détecte également quelques brèches dans la basale avec effraction de cellules carcinomateuses dans le chorion. Le carcinome épidermoïde invasif est fréquemment constaté  d’emblée ou succède aux stades précédents. Il se distingue par la pénétration de lobules ou travées  carcinomateuses en plein chorion ou déjà dans les tissus adjacents. Un infiltrat inflammatoire plus ou moins important est présent dans le stroma .Plusieurs types histologiques peuvent être distingués selon le
degré de maturation kératinocytaire (carcinomes différenciés, peu différenciés, indifférenciés). Le moins différencié est le carcinome à cellules fusiformes. Des cellules indépendantes, fusiformes, ressemblant aux sarcomes y sont observées. L’étude immunohistologique permet de trouver dans le cytoplasme de quelques cellules des filaments de cytokératine, ce qui signe l’origine épidermoïde de ces tumeurs.
Le pronostic des carcinomes épidermoïdes infiltrants (« grading » histologique) est fonction demultiples facteurs : taille initiale de la tumeur (T de la classification TNM), présence ou non de métastases  ganglionnaires homo- ou controlatérales, type histologique (les formes moins différenciées étant en principe plus sévères), l’existence d’un certain degré de neurotropisme et enfin la topographie. Les cancers de la lèvre, comparés à ceux des autres cancers des VADS, ont en principe un bon pronostic.